Jour 1
Premiers pas
Enfin assis sur le monument sud du PCT, après avoir attendu ce moment pendant tellement d’année, je ne réalisais pas vraiment ce qui m’arrivait, et j’étais dans une sorte de flottement, où je ressentais une grande joie.
Je ne marchais pas sur un nuage mais bien sur le sable de la piste, qui était doux et souple sous mes pieds. L’exaltation augmentait à chaque première fois. Première balise au bord du chemin, premier mile, premier point d’eau à filtrer, premier serpent sur lequel Kiki, ma partenaire de marche, a failli écraser. J’étais enfin sur la grande aventure.
Kiki et moi nous étions rencontrés la veille et avions partagé un UBER pour rejoindre le terminus en ce dimanche. J’ai plaisanté en disant que nous irions ensemble jusqu’au terminus Nord. Je n’en savais rien. La probabilité était très faible. C’est pour cela que l’on part seul sur le chemin, pour pouvoir aller à son rythme. Ensuite, un homme nous a accosté. C’était James, un homme de 50 ans qui découvrait le PCT pour une journée. Il vivait dans un van mais disait être millionnaire et posséder des mines d’or. Il nous a demandé notre âge et en apprenant que j’avais 34 ans, il m’a regardé avec gravité et a affirmé “tu dois avoir eu une vie très protégée”. Cela m’a fait rire, et ensuite nous devions nous rappeler cette phrase régulièrement. Ensuite il a dit à Kiki que la marche était un bon moyen de perdre du poids. Un peu après je me suis séparé de mes compagnons de route temporaire. Maintenant j’étais seul.
Il a fallu que je m’arrête et c’est en mangeant des M&M’s quelques heures après que j’ai réalisé. Plus rien ne pouvait me retenir, et j’aurais détruit toute barrière qui se serait mise sur mon chemin.
Les premiers miles pour aller jusqu’à Lake Morena ne sont certes pas les plus spectaculaires mais ils sont beau, chaud, attendus, fleuris et ils resteront gravé dans la mémoire de tout aventurier du PCT.
Poussé par l’excitation, j’ai gravi une montagne en plein soleil. Ma vue s’est troublée, j’ai commencé à avoir des vertiges, mon cœur battait à cent à l’heure et je sentais la sueur qui ruisselait, froide, le long de mon corps, abondante, menaçante. Je n’avais plus qu’un litre d’eau car je m’étais débarrassé du reste pour m’alléger, vu qu’il ne me restait que 8km avant Lake Morena.
Je me suis dit : Tu es vraiment trop bête. Tu vas faire partie des statistiques des gens qui doivent abandonner dès le premier jour.
Puis assis, mon cœur a ralenti doucement. Après 20 minutes j’ai pu repartir. Cet épisode m’avait fatigué, et la longue journée que je venais de vivre, mais je n’avais plus qu’à descendre. Ce soir-là le burger aux piments que j’ai dévoré en compagnie d’Alex avait le gout du triomphe.
En pratique :
La première journée, j’ai été jusqu’à Lake Morena soit 32km. C’est faisable pour tout randonneur habitué à marcher cette distance mais mieux vaut prévoir de s’arrêter avant, à Hauser Creek en portant assez d’eau pour un bivouac sec et réévaluer en fonction de l’heure d’arrivée.
Comme toutes les commodités des petites villes, le magasin général de Lake Morena qui cuit quelques burgers et plats ferme sa cuisine a 19h45 et ouvre pour le petit déjeuner à 7h mais la cuisine un peu plus tard dans mon souvenir. Il est quand même possible de profiter d’un café, et de récupérer des quaters (pièces de quart de dollars) pour prendre une douche au camping. 4 dollars devraient suffire pour enlever la crasse de la journée.
Le magasin général a assez de marchandises pour pouvoir tenir jusqu’à Mont Laguna, largement, mais je conseillerais de prévoir de la nourriture pour 3 jours directement, en ayant conscience que votre appétit ne sera pas énorme et qu’un ou deux repas chauds bien mérités peuvent être pris au magasin directement.
Le camping de Lake Morena demande une donation de cinq dollars pour les marcheurs du PCT, basé sur un système de confiance, avec des enveloppes à remplir. Comme toujours, si personne ne respecte, les marcheurs du PCT risquent de ne plus être les bienvenus.