Definition : Hiker Trash

Si vous m’aviez interrogé sur le PCT avant que je parte, je vous aurais sincèrement affirmé que jamais je ne deviendrais un marcheur-déchet, un « Hiker-trash » du PCT. Le ticket d’entrée me paraissait complètement inutile et désagréable : on ne devient un vrai « déchet » qu’après avoir mangé de la nourriture trouvée par terre sur le chemin, en se déféquant dessus ou encore en étant pris pour un vagabond.

J’avais l’intention de faire une randonnée de quatre mille kilomètres dans la nature.

Bien sûr, cela incluait un nombre de douches plus restreint, des jours sans rasage, au moins dans les portions du désert les plus sèches. Mais pour l’essentiel, mon essence, ma dignité seraient préservées.

C’est là où j’ai appris ma plus grande leçon d’humilité. À peine un mois après le début du sentier, et en l’espace d’une semaine, j’étais déjà devenu un véritable marcheur-déchet, commençant par l’aventure la plus cocasse lorsque j’ai obtenu mon nom de randonneur, Big Bear. Juste deux jours après, j'ai mangé un M&M qu'une personne avait perdu sur le sentier. Juste deux jours après, une femme m'a offert un paquet de Nuggets de chez McDonald's au bord de l'autoroute, pensant que j'étais sans-abri.

L’humilité est arrivée à travers d’innombrables petits signes : il y a eu la première fois où, en arrivant en ville, j’ai courru au restaurant avant de penser à me laver. La première fois où vous je me suis baladé en centre-ville, nu sous le plastique de mon anorak et de mon pantalon de pluie car tous mes vêtements étaient à la laverie automatique. La première fois où j’ai mangé un pot de glace d’un litre, d'un seul coup, assis par terre sur le parking du supermarché, car ma chambre de motel n’était pas encore prête, que je me suis vous installé confortablement dans des toilettes publiques pour recharger votre téléphone et faire sécher mes vetements lavés dans le lavabo.

Tout cela est devenu si rapidement ma nouvelle normalité que je n'y trouvais plus aucun déshonneur.

Je pense toutefois avoir réussi à naviguer sur une frontière étroite pour ne pas sombrer dans l'excès, par exemple lorsque certains randonneurs ont choisi de ne plus se laver pendant les milles kilomètres de la traversée de la Californie du Nord. J'ai marché quelques jours près d'eux, et même en mangeant à quelques mètres de distance, c'était une épreuve : j'ai déjà senti des charognes qui sentaient meilleur et grâce au ciel, je n'ai pas eu à monter en voiture avec eux. Il n'y a pour moi aucune bonne raison de s'imposer des difficultés supplémentaires sur le chemin, et je regrette que ce genre d'attitude, qui est le fait d'une infime minorité, donne une mauvaise image des randonneurs. J'ai eu des témoignages de gens qui nous prenaient en stop et qui hésitaient à cause de mauvaises expériences comme celle-là.

J'ai saisi toutes les occasions qui se présentaient pour me laver, j'ai dormi dans un lit chaque fois que j'en trouvais un, j'ai profité de tout le luxe que je pouvais trouver à proximité de la civilisation, tout en portant les mêmes vêtements troués tous les jours et en acceptant que mes ongles restent noirs.

Soyons clairs, je ne regrette pas la sensation de ma peau cuisant sous le sel et la crasse qui s'accumulaient partout, mais j'ai bien la nostalgie du goût des glaces que je mangeais, assis sur le béton du parking, car elles avaient la saveur la plus incroyable du monde, celle d'une liberté absolue, grande et intense comme les montagnes.

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